BYOD à l’école – la fin du n’importe quoi

Le décodage des annonces du Ministre concernant le BYOD à Ludovia

Un état des lieux d’abord. Les différents gouvernements Hollande (Peillon, Hamon, NVB) n’ont cessé d’annoncer des équipements massifs en tablettes numériques pour les élèves. Comme je l’écrivais dès 2012, ces équipements n’ont jamais eu lieu car ils n’étaient pas financés et c’est une très bonne chose car cet équipement n’aurait eu aucun impact notable sur le niveau des élèves. Tout au plus auraient-il permis de creuser un peu plus le déficit du commerce extérieur.

Les annonces de Blanquer à Ludovia, dès lors qu’on les décode, enterrent de fait la généralisation massive du BYOD à l’école.

«Le but n’est pas d’arroser tout le pays de tablettes»

Les équipements auront lieu au coup par coup et seront financés soit par les collectivités locales soit par les familles elles-mêmes. Dans les 2 cas, les difficultés pour équiper une classe en tablettes seront extrêmes :

  • les collectivités locales se heurtent à une opposition de plus en plus forte des parents et des professeurs. Les appels d’offre mis en place sont vivement contestés (par exemple, dans la Région Grand-Est). Peu de régions ou de départements vont s’y frotter.
  • même si le taux d’équipement des élèves en matériel BYOD est extrêmement élevé (plus de 95%)(1), il sera très compliqué, pour les enseignants qui le souhaitent, d’unifier une approche pédagogique pour une classe entière du fait que les élèves ont des matériels différents. A part quelques enseignants très motivés, l’usage du BYOD en classe restera confidentiel.

Dans l’Education Nationale, expérimenter, c’est enterrer.

Sans doute par souci d’afficher un esprit d’ouverture, le Ministre a parlé de financer des expérimentations ciblées. Or, l’expérimentation est à l’Education Nationale ce que la Commission est à l’exécutif : une façon douce d’enterrer les projets. Ici, je parle en toute connaissance de cause, j’ai constaté ceci à de multiples reprises en tant qu’industriel du secteur. Il y a aura certainement des expérimentations mais elles ne devraient pas avoir d’impact statistiquement significatif sur les usages scolaires.

Un nouveau cadre législatif pour le BYOD

Simultanément, la loi concernant les matériels connectées à été modifiée cet été et les tablettes, ainsi que les smartphones, sont interdits à l’école. L’interdiction devient la règle et toutes les exceptions doivent être mentionnées dans le règlement intérieur de l’école. J’ai pu lire ici ou là certaines thèses plus ou moins paranoïaques qui voient ces tolérances comme un cheval de Troie permettant le développement massif des outils connectés à l’école : il n’en sera rien à mon avis. Cette interdiction de principe, le fait que tous les usages doivent dorénavant être encadrés pédagogiquement, va encore plus limiter le développement du BYOD en classe.

La fin du BYOD est une très bonne chose pour les élèves.

BYOD et tablettes

Et je rappelle que tout ceci est une très bonne chose et que je supporte à 100% cette politique à la matière.  Les directions auparavant prises par l’Education Nationale étaient à la fois coûteuses et préjudiciables aux élèves

Les outils BYOD du type tablettes sont soit sans impact sur le niveau des élèves, soit ont un impact négatif (vous êtes au courant de ceci si vous lisez ce blog depuis un certain temps. Voir par exemple pourquoi il faudrait interdire les portables dans les amphis  ou pourquoi on apprend mieux dans un livre que sur un écran) (2). Les tablettes sont fragiles et coûteuses, rapidement obsolètes (et pour cette raison, je rappelle que nous ne nous sommes jamais résignés à en proposer, quelles que soient les pressions commerciales que nous ayons subies). Les données personnelles des élèves, en l’absence de cahier des charges de l’Education Nationale, actuellement non protégées.

Il y a cependant des exceptions notables, qui justifient effectivement des expérimentations. Je pense notamment à l’apprentissage des langues, de la lecture et peut être certaines applications de calcul. Et aussi évidemment à l’évaluation via les données des élèves, avec des outils tels que Je Lève La Main.

 

 

 


(1) Voir par exemple  : http://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/CREDOC-Rapport-enquete-diffusion-TIC-France_ CGE-ARCEP_nov2015.pdf.

(2) Voir aussi, par exemple, Experimental Evidence on the Effects of Home Computers on Academic Achievement among Schoolchildren. Et « A quoi servent les tablettes à l’école ?», dans Le Monde du 5 juin 2013.

 

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