La mort annoncée des formateurs… n’aura pas lieu

Eric écrit aujourd’hui, sur son blog consacré à la formation, que formateur n’est plus un métier d’avenir.

Je pense que c’est écrit dans un moment de découragement passager et qu’il se trompe: au contraire, l’avenir appartient au formateur – et encore plus au professeur. Voici (très) rapidement pourquoi.

Les moyens d’enseignement à distance, électronique, DVD, etc.. ne diminuent en aucune façon le rôle des formateurs. Si c’était le cas, le livre lui-même aurait déjà attaqué les professeurs. Or le livre a un effet contraire et le professeur a un double rôle vis à vis de lui: 1) le sélectionner pour éviter que l’élève n’erre sans fin dans une bibliothèque immense qu’il ne lira jamais en entier, 2) l’expliquer (dans beaucoup de cas, l’explication va compléter ou remplacer la lecture).

Au contraire, plus les sources d’information sont nombreuses, plus le rôle du professeur est donc renforcé. Même si Google est un outil exceptionnel, il n’est pas près de remplacer un professeur.

D’une façon générale, plus l’enseignement prend une forme technique (enseignement à distance), plus le rôle du professeur est important. L’enseignement à distance est une contrainte (si on pouvait se déplacer à la vitesse de la lumière, on irait toujours sur place suivre un cours). La distance introduit forcément un déficit pédagogique, l’interaction étant moins bonne entre professeur et élève. Le rôle de la technologie est de combler au maximum ce déficit mais elle n’y parvient pas toujours et surtout, comme ce domaine balbutie encore, la compétence du professeur (compréhension des outils, aptitude à les utiliser de façon pédagogique) devient primordiale. En gros, la technologie accentue l’écart entre “bons” et “mauvais” enseignants plutôt qu’elle ne le réduit, et ceci sera vrai pour au moins les 10 années qui viennent.

Enfin, il y a deux sortes de formations. La première a pour simple but d’adapter l’élève, en tant que travailleur, à son outil de travail (c’est un usage très répandu en entreprise). Une telle formation est souvent très simple, voire mécaniste et effectivement, elle peut plus facilement être remplacée par un outil de formation automatique (un DVD, une plate-forme LMS, un site Web).

La deuxième vise à augmenter les connaissances de l’être humain, le rendre plus apte aux modifications de son environnement – et par conséquent, plus efficace, mais l’efficacité en est une conséquence indirecte – et on appelle cette deuxième sorte de formation Education.

Je ne vois aucun signe de réduction du rôle du professeur pour tout ce qui touche à l’Education. Je ne suis pas inquiet pour Eric parce qu’à la lecture de son article, j’ai bien l’impression que c’est l’Education qui l’intéresse (tout au plus a-t-il donc un problème de marketing, mais pas un problème de stratégie).

Je précise que moi aussi, c’est l’Education que j’ai en tête et que c’est pour ça qu’on développe avant tout le marché de l’enseignement (Education Nationale, Universités, Grandes Ecoles) avec Speechi. Je considère (je vais encore me faire taper sur les doigts) que l’Education Nationale a des années d’avance sur les entreprises dans l’usage des technologies éducatives. L’homme n’est pas un simple outil de travail.

(3) commentaires pour "La mort annoncée des formateurs… n’aura pas lieu"

  1. Mon titre était bien entendu provocateur…

    De plus, c’est vrai que j’ai fait l’amalgame volontairement entre les formateurs des deux types de formation, d’où le titre d’ailleurs en espérant alerter les formateurs du premier type, car pour nombre de formateurs, il faut bien l’avouer, le monde de la formation se limitte à cela.

    Je reste convaincu comme toi que la fonction de formateur continuera d’exister, qu’elle devrait même prendre de l’ampleur. Seulement, je pense que nous devons nous y préparer. Nous (je parle notamment des formateurs du 1er type) ne changerons pas nos habitudes du jour au lendemain. Pour le second type, même si je suis le premier à râler sur leur manque d’implications, d’usages… la plupart d’entre nous a déjà commencé sa mue. (j’emploie le terme nous, car je fais en effet partie des deux types 😉

    Depuis pas mal de temps, j’essaie d’allier les deux… avec plus ou moins de bonheur 🙂

    Pour info, Bruno Richardot vient de publier une carte des cultures numériques et nous avons engagés un débat sur l’éducation et la formation également là-bas qui rejoint nos billets…
    http://brich59.canalblog.com/archives/2008/04/30/9005479.html

  2. Je n’ai pas trouvé que l’article d’Eric laissait place au quiproquo ? Il m’est apparu clairement que le métier de formateur n’était pas condamné mais qu’il était en train d’évoluer.

    A la lecture de ce post, un petit détail me choque. Un détail seulement vis-à-vis du sujet évoqué, mais un détail important à mes yeux. Je lis : “La distance introduit forcément un déficit pédagogique”. La formation à distance est-elle forcément une contrainte ? Ne correspondrai-t-elle pas à un certain public et à un certain thème de formation ? Ne pourrai-t-elle pas être choisie pour certaines de ces qualités et non par dépit ?

    J’ai eu l’heureuse expérience de constater que la distance ne pénalisait pas forcément les interactions … la distance géographique pas temporelle.

    J’évoque ici la formation synchrone.

    Reliés en temps réel, le formateur et l’apprenant interagissent énormément … en fait ils ne font que ça ! Une certaine “distance relationnelle” existe dans les rapports lors des premières rencontre, mais disparaît rapidement (selon l’habilitée du formateur bien sur).

    Forcément très courte (je vais pas rester concentrer 3 heures sous un casque !), ce type de formation nous pousse à être efficace. Je parle d’une expérience en formation elearning synchrone individuelle … et oui, comme les coûts sont réduits avec ce type de dispositif, on peu se permettre d’organiser des formations individuelles 😉

    Chaque dispositif peut s’adapter à un contexte particulier. Un inconvénient peut s’avérer être un réel avantage.

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