Plaidoyer pour Erasmus

Ce qui se dégageait de la conférence européenne “20 ans après, quels enjeux pour le marché unique” à laquelle j’ai participé, c’est qu’après 50 ans de “construction” européenne, l’Europe reste souvent invisible dans la vie de tous les jours.

Les marchés des entreprises restent nationaux, voire régionaux.

L’Europe n’existe pas au niveau des peuples. A part certains cadres de grandes entreprises, qui ont pu tirer parti du principe de la libre circulation des personnes, les liens entre les pays n’ont pas été resserrés.

Il y a cependant une belle, mais timide, exception: le programme Erasmus, qui permet chaque année à 250 000 étudiants de passer une année à l’étranger. Un très beau film, des centaines de milliers de couples et même un million d’enfants, qui sont au sens propre du terme les premiers vrais européens, sont nés d’Erasmus.

Erasmus, qui coûte 450 millions d’euros par an, est aujourd’hui en danger. Il manque 100 millions d’euros pour boucler le budget 2013 et il sera difficile d’aller les chercher, dans un contexte où les états négocient le budget européen (140 milliards !) en fonction de leurs objectifs politiques nationaux.

Pourtant Erasmus, brin d’herbe fragile sur le point d’être soufflé par les vents mauvais qui emportent l’Europe, est une des seules réussites européennes réelles. Le programme devrait être largement étendu plutôt qu’abandonné. Il faudrait rendre obligatoire l’exécution de toute une année d’étude à l’étranger pour l’obtention de tout diplôme supérieur européen.

Une telle mesure très peu coûteuse (les états membres pouvant compenser entre eux l’ensemble des coûts universitaires) aurait un impact majeur (des étudiants qui s’implantent ou se marient à l’étranger, une communication réelle et non désincarnée ni technocratique entre les peuples).

Si tous les étudiants français avaient vécu au moins un an à l’étranger (et que donc 5 ou 10% y étaient restés), la question de l’Europe ne se poserait plus pour personne.