Les noms numériquement désuets des grandes écoles françaises

Alors qu’il y a aujourd’hui un consensus général pour tenter de mettre la France sur le chemin du numérique, il n’y a pas plus significatif des difficultés des grandes écoles d’ingénieurs à franchir le pas du numérique que leur nom.

Passe encore pour “Polytechnique”, qui fait référence à une tradition scientifique généraliste (dont l’informatique reste malheureusement quasiment absente) ou pour “Normale Sup”, dont le nom fait référence à une tradition historique.

Mais que dire des ridicules “Ecole des Mines” ou des “Ecole des Ponts”, écoles généralistes par tradition qui font référence à des technologies du XIXè siècle dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles ne sont pas porteuses d’avenir, les mines ayant, je vous le rappelle, presque totalement disparu en France ?

En toute logique, ces écoles – au moins l’une d’entre elles – auraient, depuis longtemps, du être renommées quelque chose comme “Ecole du Génie Logiciel” ou “Ecole des technologies numériques” ou encore “Ecoles des réseaux”. Du moins, cela aurait été un signe “fort” et “puissant” de les appeler ainsi, comme disent nos politiques.

Même chose pour l’école Centrale (“Des Arts et Manufactures”, on croit rêver !) qui gagnerait certainement à être renommée “Ecole des Périphériques”, ce qui choquerait certainement les sensibilités de certains de mes camarades.

Même l’Ecole Nationale des Telecoms (“Sup Telecom”), censée être par nature proche des technologies numériques, n’a pas daigné intégrer le mot “Réseau” à son nom. Et pourtant, c’est bien au programme.

Vous pensez que tout ceci n’a pas d’importance ? Vous vous trompez, car malheureusement, les mots ont bien un sens. La réalité est que les matières numériques ne sont pas enseignées aux meilleurs scientifiques au niveau où elles devraient l’être, que le retard avec les pays anglo-saxons est immense et que la situation dure depuis 30 ans – j’en sais quelque chose pour être un diplômé des deux systèmes.

Ce décalage, qui a des conséquences immenses sur la compétitivité du pays est rarement évoqué. Pourtant, il est, à lui seul, responsable d’une bonne partie du déficit du commerce extérieur. Il y a des millions d’emplois à créer dans le numérique, et une bonne partie sont des emplois qui permettent d’exporter.

[A l’inverse, les écoles de commerce se précipitent dans une course au nouveau nom et au nouveau logo, cette course étant tout aussi ridicule, mais moins grave dans ses effets. Voir par exemple les nouvelles appellations “Audencia” (Sup de Co Nantes), “Skema” (Sup de Co Lille), dont le principal mérite sera sans doute d’avoir bien gavé quelques agences de com.

D’un côté, la tradition immobilise tout. De l’autre côté, l’absence de respect pour le fond permet tout.]

(5) commentaires pour "Les noms numériquement désuets des grandes écoles françaises"

  1. Un peu auto-centré, le rédacteur du message ?????
    Je vous réponds en mon nom propre, et pas au nom de l’institution qui m’emploie, et qui est une de ces écoles “numériquement désuetes” qu’il évoque. Peut-être le nom en est-il mal choisi (faudrait il un minéolia, comme on a vu fleurir les véolia, truclala etc… ?). Il n’empêche… Ce nom nous rattache à une histoire, mais parle aussi de technologies très contemporaines : notre petit pépére rédacteur n’a-t-il jamais offert une petite douceur en or à l’une de ses chéries (et l’or, d’où vient il ?), que met-il dans son véhicule automobile (et le pétrole, d’où sort il celui là ? petit forage, petites connaissances géologiques un peu nécessaires… ) et si petit pépère, toujours dans son paradigme méta-moderniste, veut et défend l’électricité nucléaire qui fait fonctionner ses réseaux et machines à faire du numérique, ben il lui faudra bien un petit peu d’uranium, et ou donc est-ce qu’on la trouve-t-on, cette substance rare et chère, si ce n’est dans un genre de truc qui s’appelle une mine ? ). Bref, taper sur les technologies qui nous viennent du roi Salomon ne me parait pas la meilleure façon de faire avancer la cause du numérique. Et cette manie de vouloir, à tout crin, changer le nom pour faire moderne (et pourquoi pas une petite prothèse pectorale pip), que révèle-t-elle de l’insécurité émotionnelle chronique de notre locuteur ?

    Bref, je retourne aux tâches que je dois à mon employeur du XIX siècle (peaufiner des cours en elearning, sur une plateforme opensource, avec des ressources issues pour parties des chaines éditoriales…) et qui néanmoins me passionnent… au plaisir d’un prochain débat !!!

    Belle fin de journée, belle année, chuc mung nam moi, et vive le numérique ET la matière bien glèbeuse.

    Nathalie Veuillez
    Ingénieure UTC / Assistance pédagogique Ecole des Mines, et fière d’y être.

  2. Assez d’accord avec Nathalie. Votre laïus frôle le “buzz” pour être “moderne”. C’est votre version ou plutôt votre regard que vous projetez ici.
    Si je retiens les grandes idées que vous véhiculez à travers ce “post” :
    – en France, côté grandes écoles, on est soit trop ringard soit trop ridicule.
    – “il faut” être compétitif… viser l’exportation…retard sur les anglo-saxons…etc…

    Conclusion : on voit bien que vous êtes diplomé de “l’autre” système et que vous aimeriez bien en calquer un max. sur le système français mais je ne crois pas que c’est en ayant une vision aussi bipolaire et manichéenne (à l’instar de nos voisins outre-atlantique) que l’on fait avancer les choses. Bien essayé quand même ! Vous vous êtes exprimé, moi aussi.

  3. @Gil:

    Où avez-vous été cherché tout ça ? Ce ne sont pas mes idées, ni ce qui ressort du billet. La phrase importante du billet (si tant est qu’il puisse y en avoir une dans un billet d’humeur) est celle-ci “il n’y a pas plus significatif des difficultés des grandes écoles d’ingénieurs à franchir le pas du numérique que leur nom.”

  4. Bien, me voilà rassuré 😉
    D’autant plus que j’ai lu certains de vos articles où vous savez bien replacer les technologies dans le contexte espace-temps.
    Je voudrais simplement souligner qu’il y a “dans l’air” depuis quelques années ce courant marketing visant à tout rebaptiser sous des prétextes parfois fallacieux.
    Peut-être faut-il y aller au cas par cas et ce, sans renier l’histoire et les fondements des grandes écoles ?
    Et puis, derrière le nom, je connais beaucoup d’écoles qui n’ont pas besoin de faire parler d’elles au plan numérique et où les technologies étudiées vont bien au-delà du matériel qu’elles emploient “couramment”.

    Best regards,

  5. Combler le retard sur les USA en créant un grand corps du numérique

    […] Les corps qui administrent le pays ont une formation numérique quasi-nulle et leur dénomination même (Mines, Ponts…) appartient à un passé depuis longtemps révolu. […]

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